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Canilove - Irish Terrier

Terrier irlandaisLe Terrier irlandais ou Irish Terrier est une race de chien terrier originaire d’Irlande. A partir d’un type rustique et utilitaire, la race a été stabilisée puis sélectionnée sur des critères esthétiques. La paysannerie irlandaise, utilisatrice pragmatique de la race, a cédé le pas aux cynophiles anglais du début du vingtième siècle, et l’Irish Terrier s’est progressivement détaché de ses origines. Symboliquement, l’abolition de la coupe d’oreilles, dont l’Irish Terrier fut le premier bénéficiaire, marque ce passage du chien d’utilité au chien d’agrément. Très tôt dans l’histoire de l’Irish Terrier, la race s’est scindée en deux blocs géographiques : le Royaume-Uni et l’Amérique du Nord. Suivant l’immigration irlandaise, la race, pour s’installer aux Etats-Unis et au Canada, a eu recours à des importations massives qui ont privé le berceau de la race de ses meilleurs sujets. Après les années fastes du début du vingtième siècle, la race et les associations qui l’encadrent ont traversé une longue période de désaffection.
L’Irish Terrier a pourtant des atouts qui peuvent séduire. C’est un excellent chien de compagnie, original, de format moyen, robuste et d’entretien relativement aisé. Cependant, sa susceptibilité vis-à-vis de ses congénbères peut être un handicap en milieu urbain. Aujourd’hui la race reste scindée géographiquement. Les faibles effectifs européens, leur qualité moyenne, et l’isolement des sujets du Royaume-Uni pourraient être à l’origine d’une dérive du type physique de l’Irish Terrier. Le groupe nord-américain, plus étoffé, plus fidèle au standard et sélectionné dans une ambiance de compétition plus stimulante, semble plus à même de soutenir le futur de la race.
Rassemblés au sein du troisième groupe par la Fédération cynologique internationale, les chiens de terrier ont un dénominateur commun : la fonction de déterrage des nuisibles réfugiés dans leurs abris souterrains. Remarqués avec étonnement par les Romains envahissant la Bretagne en 55 avant notre ère, ces « petits chiens qui savent suivre leurs proies jusque dans leurs tanières » ne se verront baptisés « terrars » que plus tard. Ils coexisteront longtemps avec les griffons sous le vocable d’agasses (ou agassins). C’est le médecin de la reine d’Angleterre Elisabeth I, le docteur Keyes, qui, dans son « De Canibus Britannicus Liber » paru en 1570, les regroupe et les décrit le premier : « il y a une sorte de chien, que nous nommons terriers, car ils se glissent sous terre pour harceler et mordre le blaireau et le renard; et ils les déchirent en morceaux avec les dents, profondément sous terre, ou après les avoir tirés à la lumière » . Ces combats souterrains contre des adversaires redoutables imposaient aux terriers des qualités physiques et morales particulières qui donnent au groupe son homogénéité relative. Au physique, le type de base du terrier est médioligne, de taille plutôt réduite, possédant un poil court. La queue est écourtée (les oreilles l’étaient autrefois), mais laissée assez longue pour saisir le chien et le tirer hors du terrier.
Bien sûr, ce type initial a évolué et les 22 races constituant le groupe ont acquis des morphologies bien différentiables. Il est cependant une série de format croissant (Lakeland, Fox, Welsh, Irish, Kerry Blue, Airedale), résultant de la sélection patiente des éleveurs britanniques, qui conserve à la fois le type morphologique et le tempérament des « cabin curs » (corniauds de cabanes) de jadis. Parmi ceux-ci, l’Irish Terrier fait figure de moyenne et, proche de ses racines, illustre parfaitement les caractères du groupe. Gardien de la ferme, exterminateur de vermine, il a été sélectionné au travail pour ses caractéristiques physiques et son tempérament, mélange de témérité face à l’ennemi et de douceur vis-à-vis de ses proches. Ce chien rustique, ardent au travail et à la bagarre, a vu son type physique fixé au début du dix-neuvième siècle, et si les standards de la race ont parfois été âprement discutés, jamais l’intégrité de ce caractère si particulier n’a été remise en question.
Histoire de la race et de ses structures
Des origines jusqu’à 1900
L’Irlande, berceau de la race, n’est pas chiche de légendes et il était juste que l’Irish Terrier y joue un rôle. On y raconte que la chienne Parth-Olan, mère de la race, fut ramenée d’Egypte par un marin irlandais. Et que 1 Terrier irlandais celui-ci y avait épousé … la fille du Pharaon! Les hypothèses Il est extrêmement difficile, voir illusoire, de retracer l’arbre généalogique de la race avant le début du dix-neuvième siècle. Cependant, de nombreux auteurs s’y sont essayé et c’est pourquoi nous récapitulerons rapidement leurs hypothèses. Filiation anglaise – Cette théorie allogène, défendue par les amateurs britanniques de la race, fait intervenir le vieux terrier anglais « black and tan » (noir et feu), aujourd’hui disparu et qui sert à la reconstitution de nombreux arbres généalogiques de race canines anglaises.
Des apports de Scottish Terrier, dans sa version ancienne (haute sur pattes) et surtout de Welsh Terier, auraient ainsi façonné l’Irish Terrier actuel . Filiation irlandaise – « On peut affirmer que la race est originaire du nord de l’île, et dès le départ élancée et fauve ou de couleur rouge. On suppose généralement que l’origine de cette race nordique doit être recherchée dans les croisements de terriers avec le Wolfhound ou des chiens de type Greyhound à poil dur ». « Une de nos opinions est que l’Irish Terrier a existé en Irlande avant que la main des amateurs ne l’ait sélectionné. Je considère qu’un Wolfhound miniature correspond assez bien à la description de l’Irish Terrier ». Ces deux opinions empruntées à des chroniqueurs cynophiles des années 1920 , illustrent la théorie autochtone refusant tout apport de sang étranger (c’est-à-dire anglais).
Cette théorie cherche à reconstituer l’arbre généalogique de l’Irish Terrier en utilisant uniquement des ascendants irlandais. Tentative louable, mais difficile exercice de style. Les chiens irlandais ne sont que six : l’Irish Wolfhound, le Kerry Blue Terrier, le Soft Coated Wheaten Terrier, l’Irish Terrier, le Setter Irlandais et le Glen of Imaël. Maigre parentèle que toute l’histoire postérieure de l’Irish Terrier vient démentir. Les certitudes Avant 1800 il n’existait pas de races de terriers séparées génétiquement. Avec de fortes différences régionales, tout chien d’utilité de bonne taille, ayant le goût de la chasse et de la lutte, ainsi qu’une bonne prise de mâchoire pouvait, pour peu qu’il sache fouir et déterrer la vermine, passer pour un terrier. Personne ne se préoccupait alors d’esthétique, et si tous les chiens d’un même comté avaient des traits communs, on doit l’attribuer à une présélection basée sur les performances de quelques individus réputés localement. Les déplacements de populations limités à la région et la fonction essentiellement domestique des terriers ne favorisaient pas les comparaisons . Le plus probable est que la vérité se situe entre les deux théories (allogène et autochtone). Il y a eu en Irlande des lignes de chiens autochtones (Soft Coated Wheaten, Kerry Blue et Irish), tous chiens médiolignes sans apport de sang des bassets continentaux.
Les vrais chasseurs entretenaient des souches et les paysans appréciaient les qualités multiples de ces chiens de toute utilité. Ce n’est que plus tard que les échanges entre provinces, les déplacements d’individus et les premières confrontations entre les différentes lignées conduisirent à des comparaisons et à des croisements, parfois hasardeux, où intervinrent parfois des races anglaises. C’est cette situation que découvrirent les premiers amateurs qui s’intéressèrent à la race : une grande disparité au sein de laquelle se côtoyaient des lignées épargnées par les croisements et des lignées fortement mêlées de sang Scottish, Welsh et Black and Tan; des compétitions locales où primait l’aspect utilitaire du chien et où ses utilisateurs imposaient leurs jugements aux pionniers d’une cynophilie d’agrément. Mais ces esthètes passionnés allaient bientôt s’organiser pour atteindre leurs buts : produire des Irish Terriers conformes à l’image qu’ils en avaient et éliminer de la compétition les fermiers irlandais utilisateurs de la race.
L’évolution récente, de 1900 à nos jours . L’émergence du type Au cours de l’année 1874 paraît dans le Live Stock Journal une liste des points de reconnaissance de la race et, en juillet 1875, le portrait de deux chiens appartenant au docteur Mark, supposés être des Irish Terriers. Mais leur appartenance à la race semble soulever quelques questions parmi les premiers amateurs. Parmi ceux-ci, Shaw commente : »Ce dessin doit être conservé comme l’exemple même de ce que la tête de l’Irish Terrier ne doit pas être. Prenons la chienne de gauche, dont j’apprends qu’il doit s’agir de la célèbre Kate : regardons la tête et la face de ce chien. Si la marque du Scottish n’y est pas imprimée, alors je n’y comprends plus rien. Regardez ces poils longs sur le front, partagés par une raie au milieu, et encore ces poils longs sur le museau et la mâchoire, et si cela n’indique pas un croisé Scottish, et à forte dose, je ne sais plus rien des points qui définissent un Irish Terrier ». Ces deux chiens sont alors considérés, malgré leurs défauts évidents (pour Shaw), comme de purs Irish Terriers, et même comme des exemplaires représentatifs de la race. En fait, le problème que vont rencontrer les premiers amateurs va être le suivant : définir l’Irish Terrier contre les autres races en voie de reconnaissance, ou déjà reconnues et pour ce faire, éliminer les caractères pouvant rappeler celles-ci. L’Irish Terrier n’est encore qu’une ébauche qui va surtout acquérir ses caractères morphologiques par opposition avec les autres terriers .
Aussi, quand Ridgeway, dans le même Livestock Journal, explique « Les Irish Terriers sont encore inégaux. il reste à trouver, en Irlande, une lignée de terriers n’ayant pas reçu de sang étranger » , on peut se demander quel chien il a en tête. Dans le même temps, les utilisateurs de la race, paysans et chasseurs, continuent de pratiquer ce mélange de sang en définissant petit à petit le caractère de la race. « Maintenant, et bien qu’il ait été le terrier national irlandais, force est de constater que la race est restée trop longtemps entre les mêmes mains ». Il s’agit bien sûr des mains de la paysannerie irlandaise. « Ils élèvent sans standard et, gardant les chiens pour le travail, s’ils pensent qu’un croisement avec le Mick du voisin arrangerait leurs affaires, alors ils ne se préoccupent pas de pédigrée, polluant ainsi la race avec des apports de sang étranger, et surtout de Scottish ». Dans les années 1870, les premières classes d’irish Terriers commencent à se présenter dans les expositions canines irlandaises. Là, les amateurs esthètes et les rudes utilisateurs de la race s’opposent sur ce que doit être un Irish. Pour des raisons qui nous semblent évidentes, seules les récriminations des premiers nous sont parvenues. Mais les jugements semblent prouver que c’étaient bien les seconds qui obtenaient gain de cause, et le caractère irlandais nous laisse imaginer au prix de quelles empoignades. Shaw s’indigne, par exemple, des déconvenues de Sport, à M Jamison, selon lui l’idéal de l’Irish Terrier. « Il faut signaler que ce chien n’a si souvent concouru que pour être à chaque fois surclassé par des corniauds qui n’auraient même pas dû être autorisés à se présenter contre lui ».
Et il nous décrit ainsi Stinger, vainqueur au concours de Lisburn en mai 1875 : « Dos long, pattes courtes, robe gris-bleu, pattes fauves, pieds blancs, panard et tout rempli de sang écossais ». Primé malgré tout, Stinger devait posséder de solides qualités de chasseur, de ratier, de bagarreur qui, dans l’esprit des utilisateurs de la race alors majoritaires, compensaient largement ces défauts esthétiques criants. L’affirmation des caractères Il est probable que, de concours en cours, une sélection s’effectué sur la base des points de sélection établis par Ridgeway, sous la pression des esthètes. Les membres de la paysannerie qui avaient été attirés par la compétition furent progressivement écartés par l’organisation même des expositions et par les contraintes qu’elles imposaient .
A Dublin, en mars 1876, le gagnant, Boxer, fut engagé « éleveur, propriétaire et origines inconnus » s’indigne Shaw, tout en constatant amèrement qu’il s’agit là « d’un trait typiquement irlandais ». Lors de la même compétition, Shaugraun fut présenté avec la mention suivante : « élevée par un membre de la célèbre garde 7 8 Légende de nuit de Limerick. Son pédigrée est trop long pour être rédigé, mais les personnes intéressées peuvent se présenter au poste de grade, où il est très probable qu’on le leur donnera » . Et Shaw, scandalisé, de constater qu’un éleveur irlandais peut s’avérer incapable de retrouver les origines de son chien. Alors qu’en 1875, Sport, type idéal de l’Irish Terrier selon Shaw, doit encore lutter pour faire valoir sa plastique face à de robustes chiens de ferme, dès 1879, les concours ne regroupent plus que des exemplaires se rapprochant de son type. Entre l’exposition de Dublin (mars 1875) et celle de Newtonards (1878), les choses ont bien changé.
Lors de la première, nous dit un compte rendu, « longues pattes, courtes pattes, poils ras, poil dur, petites têtes et longs museaux, tout le monde était là ». Lors de la seconde, l’oeil « parcourant les rangs, n’avait plus lieu d’être offensé, la majorité des bâtards ayant disparu » . 1879 voit la naissance de l’Irish Terrier Club et l’apparition des ancêtres de la race actuelle : Killiney Boy e Erin . Les puristes ont en effet retrouvé, au sud de Dublin, dans le comté de Wicklow et à Ballymena, dans le comté d’Antrim, des souches préservées de croisements dont ils avaient besoin pour régénérer la race . Mais le type de chien considéré alors comme le parangon de l’Irish Terrier est encore très loin de celui que nous connaissons aujourd’hui et des chiens comme Killiney Boy ou Erin ne seraient pas admis à concourir actuellement, la pureté de leurs origines restant sujette à caution. Quoi qu’il en soit ces deux chiens étaient à l’époque les modèles de l’Irish Terrier, et des documents nous permettent de voir quel aspect la race présentait à ce moment.
Erin était née à Ballymena et, découverte par William Graham lors d’une exposition à Dublin, fut achetée, bien que ses origines soient inconnues. Elle était alors la meilleure chienne d’exposition et « l’exemple né de ce qu’un Irish Terrier devait être ». Connue sous le nom de Vic, elle était décrite comme « débordant de qualités, avec une tête longue, une expression calme et éveillée, un poil dur et de couleur rouge, une excellent ligne et une queue haut placée » . Killiney Boy, quant à lui, eut quelques succès d’exposition, mais il reste surtout dans les annales comme un excellent étalon. D’ascendance Wesh par sa mère – un terrier noir et feu nommé Jess – sa robe était largement marquée de noir, avec notamment une large raie noire le long de l’échine. Son museau était pointu, son cou épais et court et ses oreilles coupées, comme c’était l’usage à l’époque. Seuls quelques chiens aux oreilles particulièrement petites échappaient à l’essoreillage, destiné à éviter les blessures et leur interminable cicatrisation, problème récurrent chez ce chien naturellement enclin à la bagarre.
La queue était également coupée très court, pour les mêmes raisons. L’influence de ces deux chiens (Erin et Killiney Boy) fut si grande dans l’établissement de l’Irish Terrier moderne que le pédigrée de Belfast Rufus, publié en 1906, contient, sur huit générations, vingt-huit fois le nom de Killiney Boy et vingt-cinq fois celui d’Erin . Leurs premiers descendants, Playboy, Gerald, Pagan II, Poppy, Peggy et Pretty Lass deviendront tous célèbres en exposition. Planifiés par Graham, les croisements de ces premières générations aboutirent à une lignée appelée « lignée de Breda ». Certains de ses membres exhibaient encore les marques sombres de leurs ancêtres Welsh, comme en témoigne cette description : « il était parfait. Fils de Pagan II, il avait les yeux cernés de noir, un museau noir comme du charbon, mais aussi, caractéristique des chies de cette époque, les plus noires des oreilles, un trait aujourd’hui disparu et qui, dit-on, ne doit jamais réapparaître » . On le voit, la couleur de la robe n’a pas été tout de suite le point de ralliement des défenseurs de l’irish Terrier. Ayant encore fort à faire pour stabiliser la silhouette générale du chien, ils considérèrent tardivement que la robe pouvait aussi intervenir comme élément de sélection.
Jusque dans les années 1880, les couleurs les plus variées étaient acceptées. Gris-bleu pour Stinger, vainqueur des années 70 et même blanc pour le gagnant de l’exposition de Belfast, Slasher, en juillet 1875, présenté comme « un Irish Terrier blanc, un magnifique chien de chasse sur terre et à l’eau » . Parmi les descedants de Killiney Boy et d’Erin, Poppy et sa lignée exprimeront avec constance cette chaude couleur rouge qui, chère au coeur des irlandais, deviendra rapidement un point de discussion entre éleveurs, jusqu’à ce que soit adoptée la robe uniformément rouge, sa teinte pouvant aller « de la couleur du maïs à celle d’une brique irlandaise toute chaude sortie du four » . Dès lors, les marques sombres, impossibles à cacher, furent rapidement éliminées. Le grand Irish Terrier de la lignée de Breda fut, dans les générations suivantes, Ch. Brickbat, chien d’exposition et étalon très demandé qui, lui aussi, participe à de nombreux pédigrées actuels. Breda Mixer, Breda Muddler perpétuèrent les qualités de la lignée tant en exposition que comme reproducteurs jusqu’au début du vingtième siècle. C’est donc entre 1875 et 1880 que les amateurs fixent approximativement le type de chien qu’ils désirent voir en exposition, selon des critères essentiellement esthétiques.
Considérant la ligne du chien (absence de bassétisme), la nature de son poil (court et raide) et, en dernier lieu, l’uniformité de la robe (variantes de rouge), ils définissent un type physique encore rustique et variable, proche de ses origines campagnardes et utilitaires (essoreillage, queue écourtée). Volontairement ou non, ils ont aussi sélectionné un caractère, une psychologie, qui deviendront pour la race un atout, au point de figurer en tête du standard. L’Irish Terrier actuel Entre le chien à la face pointue, au corps ramassé et aux oreilles écourtées qui fréquentait les exposition de la fin du dix-neuvième siècle et des représentants actuels de la race, une évolution patiente aura été nécessaire, avec une étape marquante : le vote de la loi contre la coupe d’oreilles. – L’anti-cropping law – Pour comprendre le mouvement qui donna naissance à cette interdiction, il est bon de se replacer dans la perspective d’une époque où la coupe d’oreilles, pratique traditionnelle servant de moins en moins à son but utilitaire pouvait, à juste titre, passer pour barbare. « Cette coutume barbare est de celles que l’on verrait avec plaisir tomber en désuétude. La nature n’a rien fait en vain. Des différentes parties constituantes du corps, les unes ont un but d’utilité, les autres servent d’ornement.
Ce n’est que par mauvais goût que l’on a pu penser que des mutilations ajoutaient à la beauté quoiqu’il n’en résultât aucun avantage ». Ainsi s’exprimait déjà dans son Traité des Maladies des Chiens, Delaboe-Blaine . Ne pouvant alors lutter contre cette pratique, l’auteur se borne à dispenser des conseils sur la manière de procéder et sur les erreurs à éviter. « Les jeunes chiens ne doivent pas avoir les oreilles coupées avant qu’ils n’aient atteint quatre à cinq semaines. Plus tôt, elles repoussent de nouveau et l’amputation ne peut être aussi bien dirigée que quand les oreilles sont bien développées. C’est une pratique barbare que de les arracher en tenant le choit par les oreilles et en le faisant tournoyer. L’opération ne réussit jamais aussi bien que lorsqu’elle est réalisée avec des ciseaux, qui doivent être grands et forts. Quand un chien a les oreilles coupées, on lui ampute également une partie de la queue. Les amateurs la coupent ordinairement avec les dents, mais ils serait à souhaiter que ces gens aient une plus ample dose de connaissance et d’humanité » On voit comment les moeurs brutales de la cynophilie débutante pouvaient heurter la sensibilité des gentlemen qui s’engageaient dans ce loisir avec des âmes d’esthètes. Dès l’année 1880, le problème de la coupe d’oreilles est abordé lors de la réunion générale du Club créé. Il ne sera résolu qu’en 1889 et trois grandes étapes marqueront l’évolution des mentalités et la bonne volonté du Kennel Club sur ce point.